La "banalité du mal".

 

Hanna arendt

Parmi les journalistes qui ont suivi le procès d'Eichmann figure Hannah Arendt, qui représente le New Yorker.

Cette philosophe américaine, née en Allemagne dans une famille juive, a eu dans sa jeunesse une liaison discrète et passionnée avec le philosophe Martin Heidegger et témoignera en sa faveur après la Seconde Guerre mondiale, lors des procès en dénazification. Elle accède à la notoriété en 1951 avec son ouvrage "Les origines du totalitarisme", qui fait le lien entre l'antisémitisme moderne et la montée des régimes totalitaires.
Avide de se confronter charnellement au nazisme qu'elle a placé au centre de sa réflexion, elle arrive à Jérusalem le 10 avril 1961, à la veille de l'ouverture du procès d'Eichmann, et va assister à celui-ci jusqu'au 7 mai 1961, pendant trois brèves semaines. Cela lui suffira. La philosophe publie en 1963 le compte-rendu de ses observations sous le titre : "Eichmann à Jérusalem, Étude sur la banalité du mal", sous la forme de cinq articles dans le New Yorker.
Hanna Arendt s'attendait, en arrivant à Jérusalem, à rencontrer un monstre. Au contraire de cela, elle découvre un fonctionnaire plutôt borné. Elle en déduit que le mal n'est pas le produit de cerveaux spécialement maléfiques mais de personnages ordinaires, voire de simples bureaucrates comme Eichmann. Autant dire que tout homme est susceptible de basculer dans l'abjection si les circonstances s'y prêtent, pour peu qu'il ait renoncé à faire usage de sa conscience et de son libre-arbitre.
Malheureusement, les nouveaux témoignages sur les bourreaux nazis tendent à donner raison à Hannah Arendt. Ainsi de la correspondance privée de Himmler avec sa femme, qui révèle un petit bourgeois d'une insondable médiocrité, à mille lieues du tout-puissant maître de la SS.